Hommes & Femmes, inégaux face à la maladie

5 avril 2024

Hommes et femmes ne sont pas égaux face à la maladie.

Les femmes vivent plus longtemps et vont consulter plus régulièrement, pourtant elles se perçoivent en moins bonne santé que les hommes. Plongeons dans cette réalité complexe qui mêle facteurs biologiques, prises en charge médicale et comportements sociaux.

Espérance de vie : oui, mais…

En France, les femmes vivent en moyenne 85,2 ans, et les hommes 79,3 ans. Une statistique stable depuis plusieurs années, dont la progression a été enrayée avec la pandémie COVID.

Le saviez-vous ?
« Depuis 2004, les hommes ont gagné deux ans d’espérance de vie en bonne santé. »

Si l’on regarde l’espérance de vie en bonne santé : 65,3 ans pour les femmes et 63,8 ans pour les hommes, on constate que l’écart entre les sexes n’est plus que de 1,5 an. Ainsi, le constat initial de l’existence d’un avantage féminin quant à la santé peut être questionné, d’autant que l’espérance de vie varie fortement selon les milieux sociaux et les pathologies.

Comportements et facteurs environnementaux

L’impact de l’environnement et des comportements sociaux sur la santé révèle des disparités significatives entre les hommes et les femmes.  Ces disparités reflètent des inégalités structurelles et sociétales, et ont une influence directe sur la santé. Néanmoins, ces clivages tendent à converger aujourd’hui. Si on considérait (souvent à tort) qu’il y avait des maladies d’hommes et des maladies de femmes, les choses évoluent grâce au progrès de la médecine et à notre meilleure compréhension des préjugés de genres dans la prise en charge médicale.

Les femmes ont adopté le mode de vie des hommes… pour le meilleur et pour le pire !

Le tabagisme en est un exemple flagrant. L’augmentation de la consommation dans les années 60-70 a conduit à une multiplication par cinq du nombre de cancers du poumon chez les femmes, en seulement trente ans, alors qu’il diminue pour les hommes. Dans le même temps, la consommation moyenne d’alcool baisse tant chez les hommes que chez les femmes, et bien que l’abus d’alcool soit le plus souvent associé aux hommes, ces dernières font de plus en plus d’excès.

L’environnement joue donc un rôle majeur dans la probabilité de développer une maladie. Les emplois précaires, le manque de ressources, les charges domestiques et familiales, et les violences sont autant de facteurs qui se traduisent souvent par un renoncement aux soins ou une dégradation de l’hygiène de vie. Cependant, des études récentes montrent que les seuls facteurs environnementaux ne suffisent pas à expliquer certaines disparités, notamment pour les cancers. En effet, les hommes contractent beaucoup plus de cancers parmi les sites anatomiques partagés. Ce qui suggère qu’il existe des différences biologiques, physiologiques, immunologiques et génétiques intrinsèques entre les hommes et les femmes.

Ces maladies qui touchent différemment les hommes et les femmes

L’autisme et la Schizophrénie

Les hommes semblent être plus touchés par les troubles du neuro-développement. Une hypothèse avancée suggère que les embryons masculins seraient plus sensibles au stress maternel pendant la grossesse. Cette disparité s’expliquerait par une plus faible concentration d’enzymes protectrices dans leur placenta, du fait que les gènes responsables sont situés sur le chromosome X.

Les accidents vasculaires cérébraux

Les femmes sont davantage touchées que les hommes dû à l’influence de certains facteurs de risque, plus prononcée chez les sujets féminins. Parmi ces facteurs, on trouve l’hypertension, dont la survenue pendant la grossesse augmenterait le risque d’AVC de nombreuses années après l’accouchement, ou encore la fibrillation auriculaire, qui doublerait le risque d’attaque cérébrale par rapport aux hommes. De plus, les difficultés de prise en charge et de traitement sont plus marquées chez les femmes, le diagnostic étant posé moins rapidement que chez les hommes.

La dépression

Le syndrome de dépression touche deux fois plus les femmes que les hommes, une prévalence attribuée à des facteurs biologiques, psychologiques et sociaux. Cependant, bien que la dépression soit plus fréquente chez la femme, la mortalité par suicide concerne principalement l’homme. La dépression est une pathologie pour laquelle les rapports de genre peuvent avoir une incidence sur le diagnostic, en défaveur des hommes.

Les infections sexuellement transmissibles

Les femmes sont particulièrement sujettes aux infections sexuellement transmissibles. En effet, la muqueuse vaginale est plus fragile que la peau qui recouvre le pénis, ce qui les expose davantage à ces infections. De plus, la surface de contact des organes sexuels féminins avec les agents pathogènes est plus importante, ce qui accroît les risques d’infections. Les cystites, très fréquentes chez les femmes, peuvent également être expliquées par des questions anatomiques.

Les maladies cardio-vasculaires

2,2 millions de femmes décèdent chaque année de maladies cardio-vasculaires. En cause, des symptômes moins évidents à détecter : gêne respiratoire, maux de ventre, maux de dos, fatigue.

Historiquement perçue comme une maladie masculine, le retard de diagnostic chez la femme reste un enjeu actuel majeur. L’OMS estime que 8 accidents cardio-vasculaires sur 10 sont évitables avec une meilleure information, une éducation à la santé et un dépistage ciblé. Bien que la mortalité ait diminué ces 20 dernières années, grâce notamment à l’efficacité de la médecine d’urgence et à la réactivité du SAMU, cette tendance n’est pas uniforme selon l’âge et le sexe, avec une préoccupation croissante pour les femmes de moins de 55 ans.

Le saviez-vous ?
« Les maladies cardio-vasculaires représentent la 1ère cause de mortalité féminine. »

La maladie d’Alzheimer

Les femmes sont davantage exposées à la maladie d’Alzheimer, représentant environ 60% des patients atteints. Cette prévalence peut en partie s’expliquer par leur plus grande longévité. Cependant, d’autres facteurs sont également en jeu, tels que la ménopause, qui entraîne une diminution de la production d’œstrogènes et de leurs effets protecteurs sur le cerveau, ainsi qu’une exposition plus importante à la dépression, qui semble renforcer l’incidence de la maladie d’Alzheimer.

L’ostéoporose

La maladie osseuse affecte plus souvent les femmes, touchant une femme sur trois contre un homme sur cinq. Ce phénomène peut être attribué au manque d’activité physique, qui compromet la minéralisation de leur squelette et accroît leur vulnérabilité. Cependant, les hommes peuvent être victimes de stéréotypes sociaux associant l’ostéoporose à la femme ménopausée, ce qui peut retarder le diagnostic, les fractures survenant généralement avant ce-dernier.

La sclérose en plaques

La maladie est deux à trois fois plus fréquente chez les femmes que chez les hommes, et les raisons de cette prévalence demeurent encore inconnues. Plusieurs hypothèses sont à l’étude : facteurs génétiques, fluctuations hormonales, réponse immunitaire plus prononcée chez les femmes…

 

Avec ces quelques exemples, nous voyons bien que les inégalités de santé ne sont pas seulement comportementales, environnementales ou génétiques, mais également issues de discriminations dans l’accès aux soins et dans la prise en charge médicale des patients. Bien que les progrès soient réels, les préjugés de genre et les représentations sociales continuent d’influencer l’interprétation des signes cliniques avec un impact sur la qualité des soins.